En accédant au pouvoir en janvier 2019, le président Félix Tshisekedi avait promis de construction un véritable Etat de droit et de faire de la République démocratique du Congo, une démocratie réelle vécue par le peuple. Et pour se démarquer de ses prédécesseurs, le fils d’Etienne Tshisekedi avait choisi de faire du peuple congolais, le fondement et le sens de sa conception du pouvoir. D’où le fameux « le Peuple d’abord »,   suscitant et méritant  beaucoup d’espoir et  d’encouragement.

Mais, en même temps qu’il promettait de faire  de la démocratie le fondement de sa vision politique, le cinquième président de la République démocratique avait aussi fait le choix  de former une alliance avec le président sortant, une coalition CACH -FCC présentée comme une solution idoine pour garantir la paix sociale, la stabilité politique et le bon fonctionnement des institutions. Un choix qui s’expliquait par l’absence d’une majorité propre au Parlement.

Mais, censée constituer un soutien nécessaire à l’action du changement prônée par le président Félix Tshisekedi, la coalition CACH-FCC démontre non seulement qu’elle est  dépourvue d’une réelle cohésion, mais et surtout, d’une absence remarquée d’objectif commun. Car pendant que les uns militent pour le changement attendu par le peuple et la réussite du quinquennat, on voit clairement les autres se battre pour bloquer toute action du chef de l’Etat.

Profitant  de la division manifeste au sein de son parti UDPS, certains travaillent pour affaiblir davantage le Président de la République,  le présenter  comme étant dans l’impossibilité de faire quelque chose, ou même d’être président de la République, alors que les autres observent naïvement, en optant pour une guerre fratricide, pourtant suicidaire, et un combat de positionnement auprès du président de la République.

Ainsi, au lieu d’être à l’avantage du chef de l’Etat en exercice,  qui doit logiquement rendre compte à la fin son quinquennat, le bilan de la coalition pencherait à ce jour en faveur du FCC, qui profite de toutes les faiblesses visibles de son allié et de la division autour du président Tshisekedi, ce qui est normal en politique, surtout dans le contexte congolais !

On peut à titre comparatif de cet avantage au FCC, rappeler un partage déséquilibré des postes ministériels dans le Gouvernement de Sylvestre Ilunga, où le CACH s’est contenté  de 23 postes ministériels, alors que le FCC avait raflé 42 postes dont plusieurs ministères importants et stratégiques.

Devant un regard impuissant du CACH de Félix Tshisekedi, et  sous prétexte du non-respect de la Constitution pourtant  violée à plusieurs reprises pendant 18 ans par  le FCC, celui-ci a réussi à bloquer les ordonnances du Président de la République sur la Gécamines et la Société de chemins de fer, empêchant ainsi, Gabriel Kyungu et les autres  nominés d’entrer en fonction.

Bien organisé autour de leur autorité morale Joseph Kabila, et avec  publiquement un même langage, le FCC a réussi à faire bloc derrière le président du Sénat Alexis Tambwe Mwamba, en réservant un refus catégorique au réquisitoire du Procureur Général près la Cour de cassation. C’est cette même unité qui explique la destitution sans ménagement de Jean Marc Kabund au poste de premier président de l’Assemblée Nationale. Une destitution  sonne comme une véritable démonstration de force et une humiliation pour le président intérimaire du parti présidentiel.

Toujours stratège, le FCC a réussi par des négociations interminables à bloquer jusqu’à ce jour la mise en place des mandataires publics, montrant ainsi, que rien ne peut se faire sans son accord. Et  du côté de CACH, on observe  dans toute impuissance cette situation ! Cette domination du FCC explique le silence radio observé sur l’affaire Yuma et autres affaires supposées ou réelles, impliquant plusieurs dignitaires appartenant au FCC, alors que pour le dossier de 100 jours, Vital Kamerhe, le directeur de cabinet du chef de l’Etat a été rapidement arrêté, mis en détention préventive au CPRK.  Son dossier instruit avec diligence au parquet et  son audience fixée  tribunal !

Tout en reconnaissant à l’actif du CACH, notamment au président Félix Tshisekedi, l’effectivité de la gratuité de l’enseignement, la mise en place dans la magistrature (hauts magistrats) et la volonté de rendre à la justice son indépendance, on doit aussi mettre à l’avantage du FCC, la détention d’une  majorité absolue  les deux Chambres  et la plupart des postes des  Gouverneurs de provinces, etc.

Avec cette supériorité et ses multiples stratégies, le FCC s’affirme de plus en plus et se met en ordre de bataille, alors que le camp présidentiel s’affaiblit davantage par les divisions internes et les disputes.

De ce point de vue, la question qui se pose ou qui mérite d’être posée, est celle de savoir, comment le Président Félix Tshisekedi va  inverser la tendance de la domination observée, changer les choses avec cette coalition déséquilibrée et sans objectif commun ? Comment peut-il réussir avec toutes ces divisions visibles dans son camp ? Certains autour de lui sont même qualifiés d’affairistes, d’agents doubles qui travailleraient pour les intérêts contraires à la vision du peuple d’abord !

En regardant de près la situation tant politique, sociale et économique, on s’aperçoit bien  que le mal est profond : Il faut être aveugle pour ne pas voir, ou sans être aveugle, faire simplement le choix du refus de voir ou de comprendre. Refuser de nommer ce mal ou de le dénoncer, c’est être complice, car un mal reste un mal, il n’est jamais un bien tant il s’avère être préjudiciable au bien-être de tout un peuple. Toute conscience éveillée doit logiquement s’inquiéter de ce qui se passe et surtout se demander où allons exactement !

Cette coalition CACH-FCC est elle encore viable ou le président de la République doit avoir le courage d’opter pour une cohabitation, mais avec quelle force politique derrière lui , car son parti UDPS est divisé, et l’alliance avec l’UNC totalement fragilisée par l’arrestation de Vital Kamerhe.

Nous nous demandons si le président de la République Félix Tshisekedi est conscient de ce qui passe : voit-il comme nous que la situation n’est pas tenable, qu’il doit agir et agir vite pour sauver ce qui peut encore l’être, tant au niveau de son propre camp que  de la coalition, c’est lui le chef de l’Etat.

Le Président de la République a-t-il fait le choix de subir et partir à la fin du quinquennat en reconnaissant son impuissance ? A-t-il oublié cet  élan d’espoir suscité avec sa vision du Peuple d’abord ? Aujourd’hui cet espoir est entrain de laisser place à une inquiétude,  une réelle désillusion !

Quand on porte le nom de « Tshisekedi », que d’aucuns considèrent comme porteur de changement et de résistance, peut-on se permettre un tel camouflet au sommet de l’Etat ?

Même si on peut refuser de croire en cela, en lui accordant le bénéfice du doute, nous pensons que le Président Félix Tshisekedi doit se rendre compte de l’inquiétude du peuple, de sa souffrance, car  les choses ne marchent pas. On ne change pas les choses en étant dans un mutisme.  Un chef ne reste pas dans l’observation éternelle, mais il agit.  C’est le moment d’agir, le temps risquant  de  lui être défavorable.  Son bilan  est attendu par le Peuple, il  doit reprendre le contrôle de la gestion du pays et réaliser le bien pour le Peuple qui l’attend de tous ses vœux.

 

Martin MULUMBA 

Docteur et chercheur en Droit Public, spécialité en Droit constitutionnel Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

 

 

 

 

By 24news

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