Beaucoup commencent à croire que la République démocratique du Congo s’engage vers la 4e République. Le sujet du changement de la Constitution focalise l’attention depuis un certain temps. De Kisangani à Isiro, en passant par Lubumbashi et Kalemie, le 1er citoyen du pays a parlé de cette question sans relâche. Et à son adresse devant les deux chambres réunies en Congrès le mercredi 13 décembre, Félix Tshisekedi a une fois de plus réitéré sa volonté de mettre en place une Commission l’année prochaine pour réfléchir sur la question.

 

Aux yeux de beaucoup, le train se prépare à quitter la gare. Alors que certains parlent de modification, les plus radicaux ne tergiversent pas. « Cette Constitution, on doit la changer », soutiennent les partisans de cette option. Dans ce débat, chacun avance son argument. « Tshisekedi commettrait la plus grosse erreur de sa vie s’il quittait le pouvoir sans changer la Constitution », soutient Fumutoto, un politologue proche du régime.

Ces enjeux ne sont pas nouveaux, car même Joseph Kabila, qui a déclaré avoir seul battu campagne pour la Constitution de 2006, avait lui aussi tenté de la changer. On se souviendra encore des chaudes journées qui ont caractérisé ces tentatives en 2015, qui ont fait reculer l’ancien Chef de l’État, avec une sage décision prise au niveau du Sénat par Léon Kengo Wa Dondo de retirer ce projet. Parmi ceux qui s’y étaient opposés, l’actuel Président de la République, avec tous ceux qui soutiennent aujourd’hui le changement ou la révision.

Mais qu’est-ce qui a changé depuis ? La Constitution défendue à l’époque par ceux qui sont aujourd’hui au pouvoir est paradoxalement soutenue par ceux qui voulaient son changement en 2015. Ici, pour certains, le régime en place veut exercer un des principes phares d’un parti ou regroupement politique : garder le pouvoir le plus longtemps possible. Cela ne voudrait pas nécessairement dire que c’est l’actuel Chef de l’État qui va continuer au-delà de son 2e mandat constitutionnel qui, au regard de l’actuelle Constitution, est son dernier mandat.

En se lançant dans ce jeu qui est loin d’être sans danger, l’actuel Président de la République mesure la température et peut bien se rendre compte que, contrairement au contexte de son prédécesseur, il y a plus de voies libres pour que son initiative puisse aboutir. Alors que la question de toucher à la Constitution n’a jamais été un sujet apaisé, le Président de la République et ceux qui l’accompagnent dans cette voie l’évoquent en toute quiétude, contrairement à l’époque de Joseph Kabila où le sujet de son amorce avait déjà causé des dégâts.

Au fond, tous sont d’accord pour que la Constitution soit touchée. Delly Sesanga, ancien député national et Président d’Envol, avait milité dans le passé pour que cette loi mère puisse subir des modifications. Cependant, là où le bas blesse, c’est l’épineuse question des mandats.

Alors que l’actuelle Constitution accorde au Président de la République 5 ans, renouvelables une fois, soit 2 mandats, l’opposition craint que le changement de la Constitution envisagé par le régime en place puisse faire table rase de cette disposition. L’opposition estime qu’une nouvelle Constitution ramènera le compteur à zéro pour l’actuel Président de la République, qui reviendra pour un 3e mandat qui sera, pour la nouvelle Constitution, un 1er mandat.

La crainte pour l’opposition se situe à ce niveau, estimant que la 4e République va permettre à Félix Tshisekedi de s’éterniser au pouvoir. Mais comme dit ci-dessus, le régime en place se voit fort pour s’engager dans cette bataille sans concession : « Qui est celui qui va m’interdire de changer la Constitution ? », avait dit le Président de la République dans l’une des étapes de sa dernière itinérance.

En s’engageant ainsi avec assurance, le Chef de l’État considère avoir en face de lui une opposition faible. Il appartient évidemment à cette opposition de faire preuve de sa capacité mobilisatrice dans les jours qui viennent. Mais pour bon nombre d’observateurs, bien que la voie semble ouverte pour le changement de la Constitution, plusieurs paramètres ne vont pas dans le sens de cet ambitieux projet. Parmi ceux-ci, les conditions sociales des Congolais qui ne se sont vraiment pas améliorées depuis l’avènement de Félix Tshisekedi, bien au contraire, et la question sécuritaire dans l’est du pays, pour ne citer que ceux-là.

Le Président de la République aura donc intérêt à se focaliser sur ces questions avant de mettre en place cette Commission qui va réfléchir sur le changement ou la modification de la Constitution.

Jacques Amboka Mokoko

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