*La situation sécuritaire a toujours été volatile dans la partie Est du Congo comprenant trois des six provinces héritées de la colonisation, à savoir Katanga, Kivu et Orientale ; les trois autres étant alors les Kasaï, l’Equateur et Léopoldville (couvrant actuellement le Kongo Central, le Kwango-Kwilu et Kinshasa)…*

De 1960 à 2021, le *Katanga* s’affiche avec une demi-douzaine de périodes d’insécurité : conflits communautaires entre Katangais et Kasaiens en 1960, en 1992-1993 et, depuis, quelques velléités au cours de ces 2 dernières décennies ; sécession katangaise en 1960, guerres Shaba 1 en 1977 et Shaba 2 en 1978, phénomène Bakata Katanga au cours de ces dix dernières années.

De 1960 à 2021, le *Kivu* se singularise avec le phénomène Maï-Maï au milieu des années 1960, la mutinerie conduite par les mercenaires Jean Schram et Bob Denard en 1967, le maquis de Laurent-Désiré Kabila autour des années 1970, les troubles à l’origine de l’opération Mbata dans les années 1980-1990, l’invasion en 1994 des ex-Far et milices Interhamwe devenues Fdlr, la guerre de l’Afdl en 1996-1997, l’apparition du Rcd via la guerre du 2 août 1998 suivie plus tard de celle du Cndp et du M.23, la réactivation du phénomène Maï-Maï et du phénomène Adf-Nalu, les conflits fonciers entre diverses communautés locales.

De 1960 à 2021, l’ *Orientale* ou Province Orientale est marquée par divers conflits : rébellion lumumbiste et muleliste entre 1960 et 1965, guerre de l’Afdl en 1996-1997, guerre du Mlc en 1998, confrontation entre armées rwandaise et ougandaise en 2002, invasion des Mbororo, invasion de l’Armée de Libération du Seigneur (Lra), guerre Lendu et Hema ayant justifié l’Opération Artemis en 2003, réactivation des groupes armés. Dans sa dépêche du 3 mai 2021, Radio Okapi en compte une douzaine !

*TOUS LES INGREDIENS DE LA DEFLAGRATION SONT REUNIS*

Au fait, la plupart des confits qui affectent l’Est du pays ont la même origine pour ne pas dire la même cause : la *transplantation* dans ces provinces, pendant la colonisation belge, de plusieurs communautés ethniques et tribales des pays voisins comme les Burundais et les Rwandais (Congo Belge et Ruanda Urundi), mais aussi les Tanzaniens et les Ougandais avec le concours de l’Angleterre.
Effectuée également pour des ressortissants congolais d’autres provinces, cette transplantation s’opérait essentiellement pour des raisons économiques de maximisation de la production minière et de la production agricole, toutes d’exportation.
Pour les minerais, on peut citer l’exploitation du cuivre et du cobalt au Katanga ainsi que de l’or au Kivu et en Orientale, de même que l’exploitation du café, du cacao, du coton, du tabac, des huiles à l’Orientale et au Kivu.
S’agissant principalement du Kivu et de l’Orientale, le conflit atavique  » champ-animal  » fera le reste, le champ pour le sédentaire, l’animal pour le nomade. Or, depuis la nuit des temps, la cohabitation a toujours été difficile entre cultivateurs et fermiers. A la base : gestion de l’espace.
Avec la mise en valeur des nouveaux minerais comme le coltan dans le Kivu et l’expansion du mouvement islamiste à l’Est du pays (partie où l’islam est plus implanté qu’à l’Ouest essentiellement chrétien), tous les ingrédients de la déflagration sont réunis.

*VEUT-ON ALORS VRAIMENT RESOUDRE LA CRISE DE L’EST ?*

Dommage que dans la perception des enjeux de l’Est, la tendance est à se limiter aux 20 dernières années avec pour conséquence le piège dans lequel se retrouve aujourd’hui l’état de siège.
En 2008, il y avait eu une tentative de résolution de la question sécuritaire avec la tenue, à Goma, d’une Conférence sur la paix, la sécurité et le développement au Nord et au Sud Kivu. L’encre avec laquelle l’accord avait été signé n’avait même pas séché que les hostilités avaient repris. 13 ans après, c’est le statu quo.
Veut-on alors vraiment résoudre la crise de l’Est ?
La solution idoine consisterait, à notre humble avis, à impliquer tous les protagonistes intérieurs et extérieurs concernés dans la situation politique, économique et socio-culturelle de l’Est. Surtout en prenant celle-ci dans sa dimension *sociologique* .
Pour ce faire, il y a lieu d’associer à la recherche de la solution *historiens* , *géographes* , *anthropologues* , *sociologues* , *chefs coutumiers* et *chefs religieux.*
Qu’on ne se leurre pas : la solution étant détenue par ces *scientifiques* , c’est de ces derniers qu’on peut espérer des pistes appropriées à proposer aux acteurs décideurs politiques.
Autrement, la *balkanisation* du Congo partie du Katanga et du Sud-Kasaï en 1960 et menaçant maintenant le pays par le Kivu et l’Orientale pourrait se concrétiser.
Pour s’en rendre compte, il suffit d’observer le mouvement du curseur. Il facille entre l’une ou l’autre des provinces actuelles de l’ex-Katanga, de l’ex-Kivu et de l’ex-Orientale.
Déjà, de 1960 à ce jour, les crises armées cycliques à s’y produire obèrent sérieusement le budget de l’Etat et hypothèquent gravement la réalisation des programmes de tous les régimes qui se succèdent au pays.
De Joseph Kasa-Vubu à Félix Tshisekedi, en passant par Mobutu Sese Seko, Laurent-Désiré Kabila et Joseph Kabila, que d’argent public destiné à des infrastructures de développement investi malheureusement dans un effort de guerre interminable.
En 60 ans, ce n’est pas moins de 40 milliards de dollars américains qu’on a consciemment perdus dans des initiatives politiques, diplomatiques, économiques et culturelles visant la paix sans atteindre toutefois les résultats escomptés.
Au final, la politisation qui caractérise ces initiatives reproduit continuellement le résultat contraire…
Les seuls gagnants, s’il y a des gagnants, sont les *affairistes* . Ils connaissent, eux, la recette  » _Faites la guerre pendant que nous faisons des affaires_  » ! Ils sont si futés qu’ils n’hésitent pas de transformer en *business* l’état de siège proclamé par le Président Félix Tshisekedi. Or, le business – quand il se mue en filon – on l’entretient à dessein pour que la guerre se poursuive sous toutes les formes. Dont celle de la guérilla…rurale et urbaine actuelle en Ituri, au Nord-Kivu et au Sud-Kivu.
Moralité : pour réussir l’état de siège, il faut absolument remonter à avant l’indépendance, à la racine du mal : la transplantation *non suivie d’intégration* , c’est-à-dire la transplantation ayant généré le *repli* communautaire.

* _Enrichi, le texte originel est dans LPDA 114 du 9 novembre 2021_

*Omer Nsongo die Lema*
@die_lema
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